• chapitre huit

     

     

     

     

         Le froid était venu d'un coup. La veille encore, il flottait dans l'air comme une douceur étrange, l'apparence d'un début de printemps, malgré les feuilles jaunies des arbres et la terre qui paraissait par instants s'endormir. On savait bien que cela ne pourrait pas durer et qu'il faudrait tôt ou tard payer son tribut à la morte saison mais on ne voulait pas encore le croire. Pourtant, au soir déjà, on avait pu sentir un frémissement, une espèce de souffle frais venu du passé. Les anciens, les plus vieux en réalité, avaient levé le nez vers le ciel encore pur. Ils avaient contemplé les quelques nuages qui jouaient à se poursuivre nonchalamment et avaient haussé les épaules sans rien dire. Quelque part au fond d'eux, leurs os leur soufflaient que c'en était bien fini de cette halte inattendue dans la clémence et que les pluies des semaines précédentes étaient bien ce signe avant-coureur du temps des frimas qu'ils avaient cru déceler. Le lendemain, avant même que les plus matinaux n'ouvrent leurs portes, la neige était là, omniprésente, envahissante, aussi belle que dans les souvenirs mais traînant avec elle son cortège prévisible de privations et de difficultés et la perspective angoissante de ces longues journées glacées, si dures pour tous, si tristes. Seules les quelques sentinelles de faction avaient eu le temps de se préparer en observant, un à un puis en volutes serrées, les flocons recouvrir le Village endormi. Depuis plusieurs saisons, la neige était présente chaque année sur les collines et les forêts et c'était uniquement la soudaineté de son attaque qui avait cette fois-ci pu donner un motif de surprise.

         Blois resta quelques secondes interdit sur le pas de sa porte. Lui n'avait rien pressenti et, immobile dans le froid soudain, il frissonna avant de retourner chercher la lourde pelisse qu'il enfilait en pareille circonstance par-dessus sa veste de cuir trop légère. Il revint contempler la blancheur qui continuait de tomber et qu'il devinait à peine. Pragmatique, il chercha à évaluer ce que cette apparition soudaine pouvait changer à leurs plans concernant le nettoyage de la Ville. Pourrait-on mieux s'y cacher ou, au contraire, la neige trahirait-elle plus facilement leurs ennemis ? Il se mit pensivement en marche pour la salle du conseil où devait déjà l'attendre Lermontov. Le jour n'était pas encore levé. Seule une lueur incertaine derrière le sommet de la colline l'annonçait pour bientôt. Il tendait sa lampe à huile à bout de bras. Le sol crissait sous ses lourdes bottes ce qui le rendait particulièrement attentif et un flocon, de temps à autre, le faisait cligner des yeux. Bien que le Village ne soit jamais particulièrement bruyant, il régnait ce matin-là un silence oppressant, presque minéral. Blois, pourtant peu sensible à ce genre de réactions, avait comme un pressentiment funeste. La neige et le froid ne lui paraissaient pas de bon augure.

         La salle du Conseil était plongée dans une demi-obscurité. Seules deux lampes à huile et quelques bougies très artisanales diffusaient une lumière jaune et tremblante. Contrairement à ses craintes, Lermontov n'était pas encore arrivé. Dès qu'il parut, chacun put se rendre compte qu'il avait sa tête des mauvais jours. Comme Launois, Blois se cantonna dans une prudente réserve et ce fut Jordan qui fit les frais de cette mauvaise humeur.

              - Rien, ça change rien, hurla Lermontov. Qu'est-ce que vous voulez que ça change ? Vous croyez que parce que ça neige, les salopards de pillards sortiront pas de chez eux ? Qu'ils resteront bien au chaud, peinards, à se raconter des histoires ? Qu'ils ont fait des provisions pour l'hiver, peut-être, hein ? Foutre non, ces racailles, c’est rien que des nuisibles, des clamèches (1), que je vous dis !

         Il frappa violemment du poing sur la table avant de reprendre, soudain adouci :

              - Au contraire, bien au contraire. C'est peut-être notre chance de les débusquer tous, ces fumiers ! Si on s'y prend bien, si on arrive par surprise, sans être repérés, les traces, on les verra sur la neige. Faut bien qu'y sortent pour bouffer, pour se retrouver, pour préparer leurs saloperies, s’pas ? Alors, on les verra, leurs traces. Voilà comment je vois les choses ...

         Le jour s'était levé depuis longtemps quand Lermontov donna le signal de fin de réunion. Un jour blême, charriant de lourds nuages gris, prémices d'autres chutes de neige. Le froid semblait même s'être accru. Alors que Blois se levait avec les autres pour rejoindre ses commandos, Lermontov l'arrêta d'un geste du bras, sans rien dire. Une fois seuls, il continua de se taire, fixant obstinément la grande table rectangulaire autour de laquelle ils venaient de discuter. Il était habillé d'un pantalon épais et maintes fois reprisé, de lourdes bottes qui lui montaient au dessus des genoux et de son habituelle parka de fourrure dont il se séparait rarement durant la saison froide. Il avait jeté sa chapka sur la table. Lermontov était un homme de haute stature dont, plus jeune, la force et la puissance avaient fait la réputation presque autant que la parole facile et la détermination dans les actes. Mais ce jour-là, Blois eut l'impression que l'homme était fatigué, vieilli. Les poils blancs de sa barbe, qu'on devinait dans le clair-obscur, ne lui donnaient plus cette allure de patriarche indestructible mais plutôt une apparence de fragilité, d'indécision. Peut-être est-il malade, pensa Blois tout à coup. Cela expliquerait ces alternances inexpliquées d'activité presque brouillonne et de quasi-apathie, de coups de gueule et de mutisme. Mais de quoi souffrirait-il ? Comment savoir ? Ou bien simplement le vieillissement, la lassitude... Blois fut interrompu dans ses pensées par un raclement de gorge annonciateur.

              - Blois, vieil ami, commença Lermontov, tu sais bien que, finalement, y a qu'en toi que j'ai confiance. Les autres, pffttt... conclut-il par un large mouvement de bras. Toujours à se plaindre, à proposer autre chose mais quand il faut se décider, terminé, plus personne. T'es pas comme ça, je le sais.

         Il paraissait s'adresser au mur situé derrière eux, comme pour trouver dans la pierre le mot juste, l'idée exacte. Blois qui n'était pas habitué à tant d'honneurs observait son chef avec attention et ne perdait pas un de ses gestes.

              - Bon, au fait. Deux choses, Blois. La première, c'est qu'y faut absolument qu'on se débarrasse des clamèches de la Ville si on veut être tranquille jusqu'à la nouvelle saison. Pour ça, pas d'autre solution que d'y aller maintenant. Plus tard, ce sera pire. Et il faut vider l'abcès d'un coup, je l'ai assez répété tout à l'heure. Mais, à toi, je veux bien te le dire : j’crois pas que ce sera facile. On aura des putains de pertes. Les salopards, y sont sûrement bien organisés. Enfin, je veux dire... Pour avoir survécu depuis si longtemps, ce sont des mecs qui savent sûrement bien se battre. Des bêtes sauvages, des ordures sans morale, ça d'accord, mais bien adaptées à ce milieu pourri. Leur milieu. Qui n'est pas le nôtre, comprendo ? D'où notre préparation qui doit être parfaite. Mais ce n'est pas pour ça que je voulais te parler. En fait... J'ai eu bien le temps de réfléchir. Je ne suis pas immortel évidemment, ajouta-t-il avec un léger rire. Il peut m'arriver n'importe quoi. Par exemple durant notre virée dans la putain de ville. Et il ne faudrait pas... J'ai donc pensé à toi pour me succéder ici.

         Blois ne disait rien. Il n'y avait rien à dire.

              - J'ai pensé à toi, continua Lermontov, parce que t’es le plus apte à empêcher que... Enfin, tu sais bien. Not’ seule chance, c'est de rester unis. Vigilants. Pas question de se relâcher. Surtout pas question de se battre entre nous, les autres, y z'attendent que ça. Alors, zéro pointé. Si je disparais, c'est sur toi que reposera la survie du Village. Non, ne dis rien. C’est ma décision que j’l’ai prise et qu’elle est définitive. Je le dirai aux autres lieutenants. C'est comme ça, un point, c'est tout.

         Après quelques secondes de silence, comme pour bien marquer l'importance de sa détermination, Lermontov reprit d'une voix plus alerte :

              - Il y a autre chose. Cette fille, là, Camille, où c’que t’en es avec elle ? Je veux dire plutôt : qu'est-ce qu'on en fait ? T’as eu assez de temps pour prendre une décision, non ?

         Blois baissa la tête, songeur, pour rassembler ses idées. Il savait que le sujet viendrait sur le tapis un jour ou l'autre et s'y était préparé.

            - Heu ... Je suis persuadé, commença-t-il, qu'avec le temps, elle peut nous être très utile. C'est un soldat-né, j'en suis certain. Elle connaît parfaitement la région et elle sait à merveille se dissimuler, passer inaperçue. Elle est jeune, très résistante; elle sait se battre et je crois que ...

               - T’es sûre d'elle ?

             - Eh bien... elle a changé depuis qu'elle est ici, tout le monde l'a reconnu. Je pense qu'elle a compris où est son intérêt. D'ailleurs, elle est très coopérative mais... mais, bien entendu, on ne pourra en être vraiment certains que quand on l'aura mise à l'épreuve. Justement, je pense que notre prochaine expédition sur la Ville sera un bon moment pour décider... Je crois que...

         Blois cherchait à deviner ce que pouvait penser Lermontov mais celui-ci ne disait plus rien, ne manifestait aucune émotion particulière. Il se contentait d'écouter et de dévisager son lieutenant avec patience.

              - Je vais l'intégrer à mon propre groupe, poursuivit Blois. Avec Scorpion qui l'a en charge. On sera donc trois sur notre ligne de milieu de groupe. On l'aura à l’œil mais surtout j'ai demandé à Lydia qui sera en latéral de ne pas la perdre de vue. Si elle s'échappe, si elle présente la moindre gêne, terminé. Qu'est-ce que tu en penses ?

             - Rien. J'en pense rien. C'est ton problème. Mais j’veux pas que tu passes trop de temps à t'occuper d'elle. Ou, encore pire, qu'elle nous fasse des merdes dans la Ville. Donc, au moindre signe que ça va pas, tu l'élimines, comprendo ?

             - C'est d'accord, au moindre signe, on s'en débarrasse, reprit Blois. C'est exactement ce que je pense.

         Lermontov se leva pesamment de sa chaise, avec un petit soupir, comme si le fait d'être resté longtemps assis à parler, lui pesait tout à coup. L'entretien était terminé.

     

     

         Les quelques jours qui précédèrent leur départ pour la Ville furent particulièrement éprouvants. Lermontov était partout, tançant les uns, prodiguant ses conseils aux autres, tenant à vérifier jusqu'au moindre détail les équipements et les armes, répétant encore et encore ses consignes à chacun. On aurait pu croire que cette expédition, banale en vérité si on exceptait les effectifs engagés, était la première du genre. Cette fébrilité inaccoutumée, qui rejaillissait sur tous et avait abouti en réalité à énerver tout le monde, expliquait le vif soulagement de Blois à se retrouver enfin en opération. Tôt le matin du départ, alors que la nuit recouvrait encore le Village de sa chape d'obscurité, il avait regroupé ses trois groupes pour une dernière réunion au cours de laquelle il répéta les consignes que chacun possédait parfaitement depuis déjà longtemps. La neige s'était miraculeusement arrêtée de tomber deux heures auparavant dans une espèce d'encouragement à aller de l'avant. Mieux encore, la lune que l'on n'avait pas aperçue depuis des jours était au rendez-vous. Le froid était perçant. Blois observa ses soldats une dernière fois avant de donner d'un signe de tête l'ordre de se mettre en marche.

         Le plan de Lermontov était simple : deux équipes, sous les ordres respectifs de Launois et de Blois, étaient envoyés en éclaireurs. Bien que leurs ordres soient de se comporter exactement comme à l'accoutumée et donc d'être les plus discrets possible, Lermontov comptait sur eux pour, une fois passés dans les ruines, permettre de débusquer les indésirables qui ne manqueraient pas, pensait-il, de réagir à cette intrusion. C'était alors qu'il se promettait d'intervenir avec le gros de ses effectifs restés quelques centaines de mètres en arrière. Dans cette perspective, la neige était indéniablement leur alliée. Il disposait au total d'une trentaine de combattants ce qui était peu, évidemment, si l'on prenait en compte la superficie assez considérable de la Ville, mais présentait à l'inverse l'avantage de ne pas attirer trop tôt l'attention. De toute façon, il n'y avait pas d'autre solution envisageable puisqu'il ne fallait pas dégarnir davantage le Village lui-même. Face à l'inorganisation probable de leurs ennemis, cette stratégie risquait néanmoins de se révéler très efficace. Même Launois, l'éternel touche-à-tout, n'avait pas eu de remarques particulières à formuler.

         Camille, quoi qu'elle ait à dire de son enrôlement de force dans la petite armée de ses geôliers, était heureuse. Pour la première fois depuis le début de sa mésaventure, elle franchissait réellement les limites du Village. Blois qui la surveillait de près s'amusait à la voir humer l'atmosphère glacée de cette fin de nuit, un peu à la manière d'un animal qui, privé depuis longtemps de sa liberté, retrouverait soudain la griserie des grands espaces. Ils progressaient dans un silence total depuis une dizaine de minutes quand, surgie d'un bosquet d'arbres, une masse noire se matérialisa devant eux. Amaigri, efflanqué, Serp était de retour. Blois arrêta d'un geste Scorpion qui venait de sortir son poignard et s'apprêtait à s'élancer. Le grand chien s'approcha en remuant la queue du groupe immobile et vint se coucher aux pieds de sa maîtresse qui n'avait pas fait un geste. Camille se pencha pour flatter l'animal qui se contorsionnait à présent en gémissant faiblement. Durant toutes ses journées de chasses solitaires, il avait attendu ce moment extrême, cette minute d'indicible bonheur. Peut-être avait-il monté ainsi la garde à attendre celle qu'il ne pouvait oublier. Peut-être aurait-il attendu jusqu'à la mort. Blois qui en avait vu d'autres était très impressionné par cette fidélité hors du commun. Il se pencha vers Scorpion qui attendait, statue de glace pétrifiée.

              - C'est son dogue, Scorpion, chuchota-t-il, la bête dont je t'avais parlée. C'est une recrue de choix pour ce qu'on veut faire. Tu continues de surveiller la fille comme prévu.

         Puis, après avoir observé Camille dont les yeux dans la nuit semblaient briller de bonheur, il donna l'ordre d'avancer.

    [Camille est heureuse. Le dogue ne l'a pas oubliée. A nouveau, elle est presque libre. Le temps de la délivrance n'est plus loin. Mais Camille doit rester sur ses gardes. Elle est encore prisonnière. Elle doit faire attention.]

         La jeune fille quitta quelques secondes des yeux le sol inégal et gelé sur lequel elle marchait pour porter son regard sur sa droite. Là-bas, plus loin, dans l'obscurité qui s'éclaircissait, entre les arbres dont elle arrivait à distinguer les squelettes désolés, elle savait que la femme aux cheveux bruns la surveillait, bien plus redoutable que le soldat silencieux qui marchait à ses côtés sans la quitter des yeux. Bien plus redoutable en fait que l'homme en cuir dont elle interceptait parfois le regard presque bienveillant. La femme aux cheveux bruns, elle, était impitoyable et terriblement efficace. C'était elle son ennemie.

     

     

         Lime avait deux bonnes raisons d'être de mauvaise humeur. D'abord, il avait faim. Il sentait son estomac gargouiller comme dans les pires moments. Il n'avait rien mangé depuis les misérables restes partagés la veille avec les autres. Il avait faim. Une putain de faim  ! Mais c’était pas vraiment nouveau. D'ailleurs, si Tronche était venu le chercher, c'était précisément pour y remédier. Et il savait que, d'une manière ou d'une autre, ils trouveraient de quoi becqueter. Malgré le putain de froid qui leur était tombé sur la gueule, comme ça, sans prévenir. Il ne s'inquiétait pas pour ça. Non, la vraie raison de sa mauvaise humeur, de sa rage plutôt, c'était la trahison de la putain d'araignée qui partageait habituellement son sous-sol. D'abord, il l'avait pas cru, non, pas pu le croire  ! Avec un petit morceau de bois, il avait délicatement exploré la toile mais rien : la saloperie d’bestiole s'était fait la malle. Comme ça, d'un seul coup ! Il était resté stupide pendant une bonne minute puis la colère s'était emparée de lui. Il avait massacré avec la main la soie délicate de la toile, laissant le coin de mur à nu. L'abandonner, lui ! Lui qui aurait pu l'écrabouiller mille fois, c'te vermine ! Qui lui donnait à bouffer ! Qui parfois allait même jusqu'à lui parler ! Qui la considérait comme une copine, comme un animal familier ! Voilà, c'était toujours pareil : quand on est gentil avec les autres, on vous prend pour un con ! Putain, s'il la retrouvait, il la pulvériserait; il l'écraserait lentement entre ses doigts; il lui arracherait ses putains de pattes une à une. D'imaginer cette vengeance mille fois méritée, il en salivait de plaisir à l'avance. Plus tard, quand l'autre taré de Tronche s'était pointé, de colère, il avait failli lui foutre sur la gueule. Mais non, l'était trop grand, le Tronche, trop fort pour lui. Et puis, il avait besoin d'eux pour bouffer. D'ailleurs, c'était Jacmo qui l'envoyait : l'avait repéré un chat à bouffer. Un misérable et minable chat ! Putain de neige qui vous réduisait à bouffer une charogne de ce genre. Mais faut ce qu'y faut. Lime soupira, haussa les épaules et enjamba le petit mur couvert de neige. Il suspendit son mouvement immédiatement et se rejeta brutalement en arrière, s'aplatissant sur le sol, malgré la neige. Tronche s'était arrêté et le regardait avec curiosité. Lime mit un doigt devant sa bouche et, se redressant, un peu honteux de sa précipitation, il désigna les traces d'un geste de la main. Des traces parfaites. Des pas. Bien nets. Trois hommes. Tronche s'avança pour mieux regarder mais Lime le repoussa. Son tisonnier à demi-levé dans la main droite, il enjamba le muret et s'accroupit doucement près des traces, en sifflant doucement de surprise. Il ferma à demi les yeux, comme pour réfléchir à ce qu'il voyait. Trois hommes. Ensembles puisqu'en y regardant de plus près les marques se chevauchaient alternativement. Trois hommes ici, dans son coin à lui ! Et depuis pas longtemps : les marques étaient parfaites. Apposées comme une signature après la dernière averse de neige qui ne les avait pas recouvertes, une neige qui datait donc depuis moins de la moitié d'un après-midi. Il ne les aurait jamais repérées, ces traces, s'ils n'étaient pas sortis plus tôt que d'habitude, avant la nuit. Tronche lui toucha l'épaule gauche très doucement et lui désigna du regard une autre traînée qu'il n'avait pas encore aperçue. A nouveau, Lime siffla doucement entre ses dents. Différentes, cette fois, les traces. Celles d'un animal. Un putain de dogue ! Ou alors ...

              - C'est pas un cabot, ça, mon pote, murmura-t-il, on dirait plutôt ...

                - Un loup, termina Tronche. C'est un putain de loup ...

         Un effroi incroyable s'empara de Lime. Il n'arrivait pas à s'en persuader. Pendant qu'il ressassait sa colère à quelques mètres de là, des types étaient passés accompagnés d'un loup apprivoisé, fallait croire. Il était indiscutablement avec eux, le putain de loup. Les suivait pas. Çà va jamais seul, un loup. Lime se releva brutalement et, bousculant Tronche qui s'affala dans la neige, pris d'une panique irraisonnée, il se mit à courir comme un fou vers sa tanière. Tronche lui emboîta le pas en silence. Ce ne fut que bien plus tard qu'ils décidèrent de prévenir Jacmo et les autres.

     

    (1) clamèche : fou, dingue

    SUITE ICI

    Tous droits réservés

    Copyright France 943R1G


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :